Comment être conscient de ses propres émotions ?
Pour avoir des relations saines avec les autres, au travail comme à la maison, il est important de pouvoir être conscient des émotions que l’on ressent. Pourquoi ? Lors d’une interaction, il n’y a pas que des mots qui sont partagés. Il y a aussi une inflexion de voix, une humeur, un degré d’attention, un ton, … Et ce sont ces éléments, plus que les mots et les idées, qui vont déterminer l’issue positive ou négative de la conversation. Il est donc important de développer sa conscience émotionnelle. De remarquer les émotions, chez soi et chez les autres. Et comme l’humeur, le ton, l’attention, sont en général guidés par notre état émotionnel, c’est celui-ci que nous devrions prendre en considération en premier.
La conscience émotionnelle est à la base de l’intelligence émotionnelle. Et celle-ci est essentielle pour posséder la capacité de gérer les rapports humains. Il faut savoir identifier l’émotion de l’autre, pour ne pas répondre sur la même intonation et ne pas laisser le ton monter. Il faut savoir identifier sa propre émotion, pour ne pas se laisser emporter par elle, lors qu’un coup de colère par exemple.
A suivre ...
Pourquoi c’est difficile d’être conscient de ses propres émotions ?
Nos réactions sont pré-programmées
« Dans sa plus grande portion, notre comportement dans le monde est une question de cause et conséquence. Quelque chose se passe, et nous y répondons de manière instinctive. Il s’avère que ces réactions instinctives ont très peu à voir avec notre conscience. » Annaka Harris1
Cela est arrivé à bon nombre d’entre nous, d’avoir eu un moment de colère. Seulement on ne s’est rendu compte qu’après coup qu’on a ressenti de la colère. Et on s’est peut-être même impressionné soi-même par la force de l’explosion. On s’est levé un matin de mauvais poil, sans trop savoir pourquoi. Ou bien il y a un aspect de notre personnalité que nous savons devoir changer, sans vraiment arriver à le faire. Oui, la majeure partie des impulsions qui guident notre vie quotidienne ont leur origine dans des mécanismes et des émotions inconscientes.

Notre société moderne nous distrait
« Nous sommes parfois tellement prisonniers et conditionnés par nos émotions qu’on oublie qu’elles influencent considérablement la façon dont nous vivons. » Jon Kabat-Zinn2
Et le monde moderne ne nous aide pas vraiment à être plus conscient de se qui se passe dans nos têtes. Appels téléphoniques, notifications, e-mails, publicités clignotantes et invasives sur les sites internet … Ces innombrables distractions absorbent notre attention et ne nous laissent pas le temps de regarder ce qui se passe en nous-même. Ceci dit, je ne vais pas dire que ces outils ne devraient pas exister … J’adore mon smartphone et toutes ses fonctionnalités, et je n’imagine pas partir vivre dans une communauté anti-technologie. Non, je ne pense pas que le problème vienne des nouvelles technologies. Je pense que le problème est que nous n’avons jamais vraiment appris à les utiliser de manière saine. Il est tout à fait possible d’organiser sa journée et se planifier des moments réservés à l’introspection, loin des distractions.
Le cerveau humain est fait pour être actif
Le cerveau humain est lui-même une technologie extrêmement complexe et performante. Il a évolué pendant des millions d’années pour que nous puissions communiquer, imaginer, planifier, faire des hypothèses, analyser des données. Pour traiter le nombre écrasant d’informations qu’il reçoit au cours d’une seule journée, il a dû mettre en place un certain nombre d’automatismes. Des fonctions qui se déroulent de manière inconsciente. Exactement comme un ordinateur ! Le bureau, ce que nous voyons à l’écran, c’est la conscience. Et la foule de programmes qui s’exécutent pour donner ses couleurs au fond d’écran, pour traduire nos mots en code informatique, pour faire avancer l’heure … c’est l’inconscient.
Aussi, il peut être contre-intuitif pour notre cerveau de s’arrêter et présenter un automatisme à notre conscience, sur demande. C’est pourquoi cela demande de l’entraînement. Un entraînement régulier et appliqué.
Comment être conscient de ses émotions ?
« Dans la pratique de la pleine conscience, on entre en résistance avec la force de l’habitude, et on travaille les muscles du calme, de la clarté mentale, du discernement. » Jon Kabat-Zinn3
C’est quoi la pleine conscience ?
Cet entraînement, c’est la pratique de la pleine conscience. Tu en as certainement déjà entendu parler, mais je vais quand même essayer de proposer une définition ici. Imagine que tu es assise sur une terrasse par un beau soir d’été. Etre pleinement conscient, c’est le fait de remarquer la couleur du ciel, de sentir le vent sur ta peau. D’entendre les oiseaux chanter et peut-être des voitures au loin. C’est le fait de sentir une odeur de barbecue qui te plaît à tel point que ta salive s’active. C’est le fait de savoir que tu es en train d’avoir toutes ces sensations.
A l’inverse, ne pas être pleinement conscient serait le fait de, toujours en étant assis sur ta terrasse, penser à ta réunion super importante à ton retour au boulot. Te demander si tu as reçu une réponse au mail que tu as envoyé. Ou si ton fils a pensé à emporter sa crème solaire. Penser au boulot et aux choses qu’on à faire est important, bien sûr. Mais il est aussi important d’être capable de mettre ces pensées de côté au moment voulu.
Pratiquer la pleine conscience, c’est efficace ?

En 1979, Jon Kabat-Zinn a créé le programme MBSR (« Mindulness-Based Stress Reduction »), ou réduction du stress basée sur la pleine conscience. Des études montrent qu’après 8 semaines du programme MBSR, les participants ont significativement développé leurs relations avec leurs proches. Grâce à des observations par résonance magnétique, les chercheurs ont pu observer des changements au niveau de certaines parties du cerveau. Les zones affectées sont engagées dans l’apprentissage et la mémoire, l’empathie, la prise de distance et la régulation des émotions, notamment. Ces zones manifestaient une plus grande densité de matière grise. De manière globale, les participants au programme ont déclaré une gestion plus efficace des difficultés en condition de stress.
Fini les coups de colère ? Pas exactement … en tout cas pas pour moi ! Mais j’ai remarqué, comme les participants de cette étude, une différence dans ma prise de conscience de la colère, ou de toute autre émotion forte. Avant, je devais attendre la fin d’un « épisode » pour me rendre compte de l’émotion ressentie dans le moment, ainsi que de l’origine de l’émotion. Maintenant, je ressens toujours des émotions fortes, bien sûr. Mais j’ai conscience de ce qui se passe et de ce que je ressens. Ce qui veut dire que j’ai un peu plus le choix de mes réactions.
Comment pratiquer la pleine conscience ?
Il est important de mettre en place une pratique quotidienne, ou la plus régulière possible. L’idée est de préparer son cerveau à avoir des comportements automatiques.
Je me souviens de mon premier cours de conduite. Mon instructrice m’a vaguement montré les fonctionnalités du tableau de bord et hop ! nous étions sur la route. Je crois que pendant cette première heure, c’est plutôt la monitrice qui a piloté la voiture depuis son siège passager amélioré. J’étais complètement dépassée par le nombre d’éléments auquel je devais apporter mon attention. Aujourd’hui je prends plaisir à conduire et à partir en voyage en voiture. Mes heures de cours de conduite, et mon expérience sur la route depuis, m’ont permis de rendre automatiques la plupart des actions requises. C’est la même chose pour la pleine conscience. Une pratique quotidienne permet d’acquérir les automatismes nécessaires.
Aussi, il est important d’éviter de se juger. Il est bien trop facile de se dire « je suis vraiment trop nul » quand on essaye quelque chose de nouveau. Ou même quand on fait une erreur en faisant quelque chose qu’on a l’habitude de faire. « J’y arriverai pas », « c’est pas pour moi », notre cerveau nous envoie ce genre de message pour une raison très logique. Il cherche à éviter de dépenser de l’énergie. Quand on essaye d’apprendre quelque chose de nouveau, le cerveau doit créer de nouvelles voies neuronales. Et ça lui demande beaucoup d’énergie. En revanche, pour exécuter un automatisme il suffit de réutiliser les voies neuronales déjà en place. Et ça ne lui coûte rien.
Donc quand tu essayes d’adopter de nouvelles habitudes plus saines, aie de la compassion et de la bienveillance pour toi-même. Ne te laisse pas submerger par l’impression que tu n’y arriveras pas. Tiens le coup, et dis-toi que ce ne sera difficile que le temps d’adopter de nouveaux automatismes.
Quelques exercices de base pour pratiquer la pleine conscience
Ces quelques pratiques sont destinées à nous aider à prendre conscience de nos pensées, nos émotions et nos sensations corporelles.
Le yoga
Certaines positions de yoga nécessitent de relâcher certaines parties du corps tout en laissant d’autres sous tension. Il s’agit alors de se concentrer pleinement sur les sensations de son corps.
Faire 10 minutes de yoga le matin, je trouve cela idéal pour réveiller son corps et bien commencer la journée. J’utilise l’appli « Yoga Studio » (en anglais) qui propose des séances qui durent entre 10 minutes et une heure. Dans la position « poupée de chiffon », par exemple, on est debout, le corps penché vers le sol, les mains attrapant les coudes. Il s’agit de relâcher tout le haut du corps, en laissant le torse se relâcher. Alors que les genoux sont légèrement pliés et les jambes sont donc sous tension. Apprendre à relâcher une partie du corps alors qu’une autre est sous tension m’a beaucoup aidée dans mon apprentissage de la pleine conscience.
Les médiations
Il existe de nombreux types de méditation. Je vais en décrire deux, ce sont celles qui ont été le plus efficace pour moi.
Observer la respiration
Dans cette méditation, il « suffit » de s’asseoir, fermer les yeux, est d’observer sa propre respiration. Observer les différentes sensations qui surviennent alors que l’air entre par les narines, remplit les poumons, élargit la cage thoracique, … Cette méditation a l’avantage d’avoir une double efficacité.
Premièrement, elle focalise l’attention sur un objet, et nous entraîne à remarquer des détails. Deuxièmement, elle nous aide à se rendre compte de la manière dont notre esprit fonctionne. Si tu as déjà essayé cette médiation, tu t’es probablement rendu compte qu’il est impossible d’arrêter de penser. Tu te mets forcément à penser à ce que tu dois faire aujourd’hui, ou te souvenir de ce que tu as vu à la télé. L’idée de base de cette méditation, ce n’est pas de ne penser à rien. Le principe est de t’entraîner à te rendre compte de ce à quoi tu es en train de penser, et de doucement revenir à ton objet d’observation. Encore, et encore, revenir à la respiration.

Le « body scan » ou « scanner du corps »
Je préfère faire celle-là allongée sur le sol, plutôt qu’assise. Il s’agit de se concentrer sur une partie du corps après l’autre. En se rendant compte de la multitude de différentes sensations possibles qu’on peut avoir dans le corps.
Manger en pleine conscience
Au lieu de manger en regardant la télé ou en lisant le journal, pourquoi ne pas donner toute son attention au petit plat qu’on a sous le nez ?
Quelles sont les couleurs ? Y a-t-il des dégradés, des effets d’ombre ? Y a-t-il une seule odeur ou plusieurs ? Et le(s) goût(s) ? Arriverais-tu à identifier la température de ta nourriture ?
Activités de la vie quotidienne
Quand on fait la vaisselle, on se brosse les dents, on range ses affaires, la plupart du temps on se met à penser de manière aléatoire. Quand on souhaite s’entraîner à la pleine conscience, il s’agit de faire ces activités en remarquant un maximum de détails. La sensation des bulles sur la main et la température de l’eau. Le fait que le bruit de l’eau qui coule est différent selon l’objet qu’on est en train de nettoyer …
Voilà donc quelques conseils pour apprendre à être conscient de soi-même, de ses sensations, de ses pensées. Ce n’est que quand on commence à pratiquer la pleine conscience qu’on se rend compte à quel point on n’était pas conscient avant ! Si tu souhaites approfondir la pratique, je te conseille le livre Méditer pour ne plus stresser de Mark Williams et Danny Penman. Les auteurs y proposent un programme de 8 semaines, similaire au programme MBSR. Je l’ai fait, et ça marche !
A lire aussi, pour pouvoir nommer ses émotions : Glossaire des émotions
Et toi, quel est ton niveau de conscience de toi ? Arrives-tu à nommer toutes les sensations et émotions qui te traversent ? As-tu déjà essayé la pleine conscience ? Partage dans les commentaires …
Merci pour cet article riche et complet !
Personnellement, j’utilise des processus de coaching qui créent des états proches de la pleine conscience pour maximiser l’efficacité de mes séances de travail musicale à la guitare.
Cela permet de maximiser la prise de conscience de nombreux détails comme tu l’as dis si justement !
J’utilise aussi de tel processus dans mes accompagnements (je suis formateur en neurosciences de l’apprentissage et coach).
Là encore, cela permet de prendre du recul, d’observer ses jugements…
Ainsi, il est possible de les transmuter en pensées plus drôles et plus constructives !
Excellente continuation 😉
Merci pour ton témoignage ! La pleine conscience a des effets subtils mais efficaces dans de nombreux aspects de nos vies, pour ne pas dire tous !
Bonjour Aline,
Pour ma part, j’aime beaucoup pratiquer un degré d’attention et de conscience plus élevé en observant la nature. C’est très apaisant et même régénérant.
Un matin de la semaine dernière, j’ai été obligé de me lever à 5h à cause d’un gros mal de tête et d’une envie de vomir. J’ai pris une aspirine. Après avoir essayé en vain de lire un peu, j’ai simplement observé attentivement la nature par la fenêtre pendant de très longues minutes (je ne sais plus combien de temps à vrai dire). Les arbres, le va et vient des oiseaux, le ciel… Et cela, tout en ressentant mon propre corps. Comme une méditation les yeux ouverts.
Cela m’a fait beaucoup de bien. J’ai pu retourner me coucher très apaisé et enfin trouver le sommeil.
Je suis contente que ça ait fonctionné pour toi 🙂
Merci pour ton partage !
Génial ton article Aline !
C’est vraiment une clé précieuse que tu donnes là en abordant la pleine conscience
Le retour à soi est essentiel
Merci d’avoir abordé la respiration c’est tellement vital pour se recentrer !
À Bientôt
🙂
bonjour ! Bel article pour progresser surtout quand on a des ados à la maison. Je vais me souvenir de ce que j’ai lu car il faut que je prenne sur moi. A bientôt
🙂