Comment pardonner ?
On t’a déjà accusé d’être rancunière ? T’as déjà eu un ami qui t’a conseillé, avec toute la bienveillance du monde, de tourner la page ? Ça t’a pas donné envie de hurler ? 😉
Si tu es arrivée sur cette page, tu as peut-être déjà une idée de la raison pour laquelle tu souhaites pardonner, même si elle est encore floue.
Peut-être que la personne qui t’a fait du tort est importante pour toi, et tu te rends compte que si tu souhaites que la relation continue entre vous, tu as besoin de lui pardonner. Seulement voilà, tu as beau le vouloir, tu n’y arrives pas !
Peut-être que tu réalises que le fait de garder ta rancune te fait beaucoup de mal. Tu te lèves le matin avec un dialogue dans ta tête, tu ressasses les mêmes accusations, tu rumines les mêmes reproches. Tu es de mauvaise humeur plus souvent, tu es désagréable avec tes proches, et tout ce bad mojo commence à te grignoter l’énergie. Et tu en as assez, tu veux retrouver ta bonne humeur naturelle et ton optimisme. Et tu veux pas finir comme l’oncle Hubert et ses théories du complot … Mais comment faire ?
A suivre ...
Déjà, qu’est-ce qui t’empêche de pardonner ?
Quand tu envisages de tourner cette fameuse page, tu bloques. Tu te dis, après tout, si je pardonne, est-ce que ça ne veut pas dire que je vais accepter ce qui m’a été fait ? Est-ce que je ne vais pas dire « ok, c’est pas grave » ? Est-ce que ça ne reviendrait pas à dire que finalement, c’est moi qui ai eu une réaction exagérée ? Tu bloques ! Et comme je te comprends …
Aussi, tu peux avoir peur d’avoir l’air d’une bonne poire si tu pardonnes. Les autres vont peut-être penser que tu te fais facilement marcher sur les pieds, que t’es « trop gentil », que tu te laisses trop faire. C’est humiliant !
Et tu te dis aussi que tu arriverais bien mieux à pardonner si tu entendais un « je suis désolée, j’ai été conne, pardonne-moi ». Mais voilà, ce n’est pas toujours possible. La personne qui t’a fait du tort est peut-être décédée. Elle est peut-être incapable de te demander pardon, parce que c’est trop difficile pour elle, parce que sa fierté naturelle l’en empêche, ou tout simplement parce qu’il s’en bat le manteau. Peut-être même que la personne t’a fait des excuses, mais t’arrives toujours pas à lui pardonner. Et toi t’es là avec ton bagage, et tu voudrais vraiment pouvoir le jeter à la benne à ordures.
Et puis, toi aussi, t’as ta fierté. Elle t’a bien servie jusque là, elle t’a préservée des agressivités, elle a protégé ton amour propre. Pourquoi est-ce que toi tu devrais faire des efforts, c’est toi qu’on a blessé, merde à la fin !
Quelles sont tes options ?
Premièrement, loin de moi l’idée de suggérer que tout peut être pardonné, ou qu’il est nécessaire de minimiser, bien au contraire. Il est difficile d’imaginer pardonner certaines choses. C’est à chacun de faire son propre chemin, sans forcer.
Forcer serait d’ailleurs contreproductif : si je n’arrive pas à pardonner, je risque de me considérer comme quelqu’un de pas assez bon, pas très spirituel, pas suffisamment ouvert d’esprit. Aussi, forcer les choses peut conduire à essayer d’enterrer ce qu’on ressent, ce qui va permettre aux émotions négatives de s’enraciner et de pourrir. Il faut donc surtout aller à son rythme.
Ensuite, les différentes situations qui sont décrites dans la partie précédente sont des bloquages qui sont fréquents, que je ressens moi-même (et comment !), et qu’il est intéressant de décortiquer pour se rendre compte de leur caractère flamboyant, dramatique, catastrophiste et burlesque. En fait, nos émotions sont de vraies drama queen !
Tu peux reprendre le contrôle de la situation
Et si pardonner, c’était pas un « cadeau » que tu fais à l’autre, mais à toi-même ?
Si tu refuses de pardonner, si tu t’accroches à ton sentiment d’injustice, tu donnes en fait du pouvoir à la personne qui t’a fait du mal. Elle continue à exercer de l’influence sur toi.
Et puis on peut devenir accro à ces émotions négatives : on prend des habitudes, plus on est en colère et on s’attarde sur des accusations, plus celles-ci s’installent, se répètent et on devient accro au besoin de se sentir justifié, et il est plus difficile de s’en débarrasser avec le temps.
Alors oublie l’autre pendant un temps, et concentre-toi sur toi.
Tu peux voir les choses plus clairement
Quand on se sent trahi(e), on voit rouge. On s’emballe.
Ta meilleure amie a un nouveau mec, et tout à coup, t’existes plus. Plus de soirée ciné traditionnelle qui était votre truc à toutes les deux. Et quand tu l’appelles, elle te fait sentir que tu la déranges. Inacceptable ! Inadmissible ! Comment elle peut te faire une chose pareille ? Est-ce que t’es vraiment en train de perdre ta meilleure amie ? Les semaines, les mois qui suivent, tu comprends toujours pas ce qui s’est passé, et le sentiment d’injustice de ronge de l’intérieur. Ce qu’elle t’a fait, c’est mal.
Et si tu prenais du recul en essayant de te défaire du besoin de dire « c’est bien » ou « c’est mal » ?
A lire aussi : Comment et pourquoi méditer ?
En fait, juger une situation, une personne, un acte, c’est une seconde nature, on nous l’enseigne depuis qu’on est tout petit. Mais si tu parviens à « faire une pause », à te libérer du besoin de déterminer si quelque chose est bien ou mal, tu auras plus de facilité à voir les choses clairement, à voir les choses telles qu’elles sont ; et en tirer des leçons.
Tu peux pardonner sans excuser
Là, il s’agit de séparer ce que dit ton coeur et ce que dit ta tête. Ton coeur veut pardonner parce qu’il veut se débarrasser de l’ambiance négative qui l’empoisonne. Est-ce que ça veut dire que ta tête doit accepter ce qui t’a été fait ? Non non non !
Imaginons que tu aies parlé d’une excellente idée à l’un de tes collègues et qu’ensuite il soit allé en parler à votre chef d’unité sans mentionner le fait que c’était ton idée. Il y a d’un côté le sentiment de trahison, la peine, la déception ressentis par ton coeur, et de l’autre l’acte de vol commis par ton collègue. Tu peux alors choisir de « soigner » tes émotions négatives, en leur donnant de l’attention, en les relativisant (tu sais peut-être que ton collègue a de sérieux soucis à la maison), tout en continuant à penser que son acte est répréhensible. En séparant les deux, tu sauras mieux quoi faire pour rétablir la situation.
Tu peux oublier sans oublier
Hein ? Je m’explique.
Admettons que ton conjoint t’ait trompé. A nouveau, tu peux séparer les émotions que tu ressens de l’action, du geste. Tu peux ensuite prendre le temps de comprendre ce qui a amené ton conjoint à te trahir, peut-être que votre relation a des problèmes, peut-être que tromper, c’est une compulsion chez lui. Tu peux alors choisir de mettre « l’acte » de côté pour te concentrer sur l’origine, les raisons qui l’ont amené, et en tirer des conclusions.
Plus généralement, on peut oublier le « il a fait ci, elle a dit ça », tout en retenant les leçons apprises, les conclusions tirées. Garder les informations, jeter la rancune.
A lire aussi : Comment dépasser la rancune ?
Tu peux pardonner sans te réconcilier
On peut avoir l’impression qu’une fois qu’on a pardonné, il serait logique de se réconcilier, sinon, ça ne voudrait pas dire qu’on a pas réellement pardonné ? Pas forcément …
Tu as confié récemment à ton frère que tu envisageais de divorcer. Celui-ci, ne pouvant pas s’en empêcher, est allé en parler à vos parents, ce qui a provoqué une mini-crise familiale. Finalement, tu te rends compte que, connaissant ton frère, tu aurais pu te douter de ce qu’il allait faire. Tu lui pardonnes, soit. Mais il n’empêche que son comportement reste blâmable.
Pardonner, c’est de ta responsabilité. C’est sous ton contrôle. Mais la réconciliation est-elle vraiment possible si lui ne s’est pas rendu compte de sa faute ? La réconciliation dépend des deux personnes, elle implique que les deux aient fait leur bout de chemin …
Essaye ! Pardonne en 3 étapes …
Maintenant qu’on a fait le tour de la question, il semble clair que pardonner, ce n’est pas une décision, c’est un processus … Alors, tentons un processus …
Etape 1 Attends une seconde, j’en étais où ?
A. Qu’est-ce que tu ressens quand tu penses à ce qui t’a été fait ? Nomme les émotions le plus précisément possible. Aussi, quelles sont les sensations dans ton corps ?
B. Quelles sont tes motivations ? Pourquoi tu veux pardonner ?
Complète la phrase : je veux pardonner parce que …
Ecris toutes les raisons qui te viennent à l’esprit. Classe-les de la plus importante à la moins importante. Laisse reposer ta liste et reviens-y dans quelques jours. Ajoute, retire, reclasse. Retiens tes raisons les plus importantes. N’oublie pas de pardonner pour toi-même. Tu veux te débarrasser du bad mojo ! Adios !
C. Qu’est-ce qui t’empêche de pardonner ? Qu’est-ce qui coince ?
Etape 2 Qui es-tu, toi, ô grand méchant loup ?
A. Qu’est-ce que tu sais de la personne qui t’as fait du tort ? Essaye de l’observer avec le plus d’objectivisme possible. Quel est son caractère ? Ses qualités ? Ses défauts ?
B. Qu’est-ce qui a motivé le tort qu’elle t’a fait à ton avis ? C’est pas venu de nulle part, il a dû y avoir une motivation … Souviens-toi du contexte et essaye de le voir à travers ses yeux. Est-ce qu’il a été motivé par un trait de caractère ?
Essaye de trouver le plus d’explications possibles, fait une liste, n’hésite pas à être farfelu, à imaginer les raisons les plus folles, invraisemblables, incroyables !
C. Le trait de caractère qui a motivé le tort, est-ce que tu l’as toujours trouvé exaspérant, répréhensible, ou est-ce qu’il y a eu des moments où tu l’as trouvé charmant, attachant, mignon ? Souviens-toi de situations concrètes. Ou si tu ne connais pas la personne, imagine ce trait de caractère chez d’autres, que tu connais.
D. Vois si tu peux accepter l’humanité de la personne qui t’a trahie. Est-ce que tu peux accepter qu’elle puisse faire une erreur ?
Etape 3 Hasta la vista, baby !
A. Est-ce que tu peux apprendre quelque chose de cette expérience ? Quelles conclusions tu peux en tirer ? Est-ce que tu peux en retirer quelque chose de positif ? Fais une liste. N’hésite pas à la laisser de côté plusieurs jour et à y revenir.
B. Visualise la libération que tu ressens suite au fait de laisser les émotions se dissoudre. Ferme les yeux. Souviens-toi de ce qui t’a été fait. Qu’est-ce que tu ressens ? Et ton corps, que dit-il ?
Arrives-tu à repenser à tout cela sans être submergé(e) par les émotions ?
Alors, comment savoir si t’as pardonné ?
A quoi tu penses en te réveillant le matin ?
🙂
Explore !
Clique pour explorer …
Un film Forgiven (2019) de Roland Joffé, avec Forest Whitaker et Eric Bana
Une démarche artistique Majestart
Un livre Olivier Clerc, Peut-on tout pardonner ?
0 Comments